Une gabare ? C’est un bateau à fond plat, tout à fait adapté au faible tirant d’eau de l’Allier. Il était autrefois destiné au transport des marchandises et pouvait ainsi supporter un maximum de charge…

Oh, Piz ! Si tu avais vu cette embarcation, comme elle avait fière allure ! La rutilance de son bois me renvoyait l’étincelante beauté de mon minois… Bref, j’ai craqué.

En tous cas, pas étonnant que ta coque de noix prenne l’eau… C’est du sapin ! Au Veurdre, on fabriquait des bateaux en chêne. C’est bien plus robuste.

Si un port existe déjà au 13^ème siècle, c’est au 15^ème que l’activité batelière prospère. Aux activités de transports de marchandises et de voyageurs, s’ajoute la construction de navires. Ici, sur la place des mariniers, voituriers par eau et charpentiers de marine attendaient l’embauche…

J’en connais justement un qui pourrait réparer ta coque !

Depuis l’époque gallo-romaine, le Veurdre est à un emplacement stratégique. Pendant la guerre des Gaules, les troupes de César se trouvaient sur l’autre rive, côté Nièvre. Le seul endroit où elles pouvaient traverser la rivière Allier, c’était ici ! Rappelons qu’il s’agit d’un affluent de la Loire qui fut, de tout temps, un axe important…

Au Moyen- Âge, la cité est située au carrefour de trois grandes routes. Sa richesse attire les convoitises ! La ville s’entoure donc de puissants remparts, afin de contrer toute incursion ennemie. A l’époque, les murailles étaient composées d’une quinzaine de tours défensives, dont certaines étaient percées de canonnières…

La navigation était intense autrefois sur l’Allier ! Toues, gabares et autres chalands transportaient du bois, du vin, des céréales, du fer et autres produits agricoles, jusqu’à Nantes et Paris. Ce trafic fluvial donnait au Veurdre une grande importance. Au 19^ème siècle, il était l’un des ports les plus florissants du département...

Un marinier m’a dit qu’une fois arrivé à Paris, il revendait son bateau comme bois de chauffage et redescendait au Veurdre à pied… Piz, je t’interdis de débiter ma magnifique gabare pour en faire des buches !

« Maman, les p’tits bateaux qui vont sur l’eau ont-ils des jaaaambes…» Tiens ! Bonjour chers fidèles ! Vous m’avez l’air pressés… Admirez tout de même mon clocher ! Sous l’horloge, se trouve une baie géminée. C’est cette double ouverture séparée par une colonnette…

Désolé, une autre fois Bianka ! Nous devons trouver un charpentier de marine pour réparer la gabare de Koa... Ce nigaud de crapaud s’est dégoté un rafiot sans coque, ni voile… Pas même une ancre !

Eh ! J’entends tout, tu sais…

Une ancre ? Je vois où il y en a une ! Suivez la direction indiquée et au numéro 9 de la rue Bourbon, observez bien.

Voyons, que nous a dit Bianka, déjà ? Ah oui ! Le numéro 9. Il s’agit très certainement d’une ancienne maison de marinier… Et voici l’ancre dont elle nous a parlé !

Formidable ! Il ne me reste plus qu’à en doter ma gabare et en avant la croisière ! Je pourrais m’arrêter où bon me semble, mouiller dans des ports charmants, remonter les rivières puis les fleuves et enfin les mers ! Cap sur les Amériques !

Regarde, Koa. Ce grand bâtiment, c’est la maison de la batellerie. Pendant que j’irai trouver notre charpentier, tu pourras aller t’y procurer une voile flambant neuve.

Au Veurdre, l’activité fluviale fonctionne jusque dans les années 30. La maison de la batellerie maintient donc le souvenir de ce temps. N’hésitez pas à la visiter, vous y apprendrez des anecdotes surprenantes ! Saviez-vous par exemple que des cabanes avaient été aménagées sur les gabares pour qu’elles transportent des passagers ? On les appelait les « coches d’eau ». En 1676, Madame de Montespan elle-même serait passée en coche au Veurdre pour rejoindre les cures de Bourbon !

On apprend aussi que la circulation sur l’Allier dépend des variations climatiques. Ainsi, au 17^ème siècle, la sécheresse retient une quarantaine de bateaux ! Et lors d’un hiver rigoureux, plus de cent embarcations sont prises dans les glaces…

Brrr… Il va falloir que je troque mon veston pour un gilet de sauvetage fourré !

Nous y sommes ! Je file acheter une nouvelle voile…

Fais donc ! De mon côté, je prends contact avec un charpentier de marine... Ils étaient nombreux à attendre ici près de la fontaine. De ce point, ils avaient une vue imprenable sur les chantiers en bord d’Allier. D’ailleurs, le mot fainéant n’avait pas du tout le même sens qu’aujourd’hui ! A l’époque, il désignait les personnes qui espéraient trouver du travail…

Tadaaaaam ! Alors, que dites-vous de ma nouvelle voile ? Comme la couleur était un peu terne, je me suis permis d’y broder quelques fioritures par ici… Ajouter volants et rubans pailletés par là... C’est tout de même plus moderne, vous ne trouvez pas ?

Je crois surtout que de toute son histoire, le Veurdre n’a jamais vu un marinier comme toi…